C’est moi qui tiens le p’tit troquet de ce côté-ci de la place 
J’ai des clients fidèles, des piliers de bar et de terrasse 
Je garde un mot et un sourire pour chacun d’eux, c’est mon métier 
Mais je n’ai d’yeux que pour elle, c’est la plus jolie du quartier 
Assise, les jambes croisées, de grands yeux verts comme des calots 
Elle aime rester dehors et siroter sa menthe à l’eau 
Mais c’est la fin d’après-midi et quand le soleil s’étire 
Toute ma terrasse se met à l’ombre et je vois la belle partir 

C’est moi qui tiens le grand café 
De l’autre coté de la place 
Quand vient la fin de la journée 
J’récupère les clients d’en face 
Car le soleil de 18 heures 
Inonde mes tables et nos visages 
Imaginez mon bonheur 
Quand vient la plus belle du village 

Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’éloigner 
Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’approcher 

Je reste muet les pieds cloués, les bras ballants, la mort dans l’âme 
Car comme chaque jour, le soleil a réorienté ses flammes 
Alors la belle m’a laissé là, seul dans ma peine et ma pénombre 
Je vois sa silhouette rétrécir et s’éclairer dans l’autre monde 

Je prends le soleil dans les yeux 
Celui qui dessine les contours 
De celle qui remplit tous mes vœux 
L’amour s’approche à contre-jour 
Puis elle s’assoie de toute sa classe 
Croise ses jambes interminables 
Elle est à moi sur ma terrasse 
Je toise au loin l’autre minable

Mes yeux la suivent nerveusement, elle a repris une menthe à l’eau 
Je vois le sourire arrogant du gars d’en face, le vieux salaud 
Tant qu’le soleil se couche à l’ouest, je serai le perdant de ce jeu 
À moins qu’un jour j’ose le geste, au grand café mettre le feu

Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’éloigner 
Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’approcher

Ombre contre soleil, cette traversée dure depuis la Rome antique 
Les belles femmes aiment la lumière… 
N’y voyez pas de symbolique 

Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’éloigner 
Oh, c’est la traversée 
Oh, je la vois s’approcher