La débandade

Michel Sardou

Il y a dans l'air que l'on respire
 Comme une odeur comme un malaise.
 Tous les rats s'apprêtent à partir.
 Ne vois-tu rien de ta falaise ?
 Il y a dans les studios-délires
 Comme un vieux son de Carmagnole.
 Sœur Anne, si tu n'vois rien venir,
 Ou tu es sourde, ou tu es folle.

 Il y a dans les années qui viennent
 Comme un retour au vent d'histoire,
 Un vieux partisan dans la plaine,
 Croissant de lune et drapeau noir.
 Le vent ne sait plus où il souffle.
 Ça tourbillonne ça rend colère,
 Le cul posé entre deux gouffres
 Beaucoup plus profonds que la mer.

 Rigolez pas, mes camarades.
 La débandade,
 C'est pour demain.

 Rigolez, pas mes camarades.
 La débandade,
 C'est pour demain.

 J'ai des voyages en cavalcades,
 Billet d'avion, chemin de fer.
 Je sens monter des barricades
 Comme des cailloux dans mes artères.
 Je tourne en rond dans ma caverne,
 Moitié furieux, moitié soumis
 Avec en prime à ma lanterne
 Une tristesse indéfinie.

 Rigolez, pas mes camarades.
 La débandade,
 C'est pour demain.

 Rigolez, pas mes camarades.
 La débandade,
 C'est pour demain.

 A la fin des journées qui passent,
 Quand on est seul, quand ça va mieux,
 Lorsqu'on remet nos rêves en place,
 Qu'on s'imagine vingt ans plus vieux,
 Quels sont les hommes qui pourront dire :
 "On a fait ce qu'on a voulu." ?
 Sœur Anne, si tu n'vois rien venir,
 C'est plus la peine : on est foutus.

 Rigolez, pas mes camarades.
 La débandade,
 C'est pour demain.