L'horrible tango

Charles Trenet

Ne reviens jamais, horrible tango
 Qui sent le mégot
 Et la pompe funèbre.
 Tes airs langoureux
 Pour faux amoureux
 Et ton rythme creux
 Me cass'nt les vertèbres.
 Les yeux dans les yeux, un pas de côté,
 Les pleins dans les creux, un pas hésité... raté !...
 Remporte avec toi
 Tes vieux chapeaux-cloche
 Et ta gomina,
 Tango triste et moche.
 La mod', Messieurs, souvent est éphémère.
 Qui le sait mieux que les coquett' mémères ?
 Comm' c'est commod'
 Quand un retour heureux
 D'une vieille mod' les avantage un peu,
 Mais l'mauvais goût qui frise l'indécence
 Et fait de nous des parapluies qui dansent
 Doit limiter ces sinistres dégâts
 Et au tango qu'on veut r'lancer, je dis : halte-là !...

 Ne reviens jamais, horrible tango
 Qui sent le mégot
 Et la pompe funèbre.
 Ne reviens jamais,
 Tango des pâmés,
 Tango des paumés
 Et des pauvres zèbres.
 Les yeux dans les yeux, un pas de côté,
 Les pleins dans les creux, un pas hésité... raté !...
 Remporte avec toi,
 Tango de cim'tière,
 Tes gigolos froids
 Et tes foll's rombières !

 "Juanito ! c'est d'accord ?
 Rendez-vous au Ritz.
 On dansera le tango."
 "Si, Madame, comme mucho gusto..."
 Quelle époque !